La politique du logement à l'ULB ou comment gérer la misère en faisant payer les étudiants

La politique du logement à l'ULB ou comment gérer la misère en faisant payer les étudiants

Par Romain, étudiant habitant dans les logement de l'ULB[1].

La situation des étudiants ulbistes qui cherchent un logement abordable est critique. Alors que 7000 étudiants chaque année introduisent une demande pour avoir accès à un logement public (c'est-à-dire géré par l'ULB), l’université en possède moins de mille. Les malchanceux qui n'y trouvent pas de place se voient donc forcés de chercher des résidences sur le marché privé à des prix bien plus élevés (quitte à devoir travailler durant leur études et mettre en péril leur réussite scolaire).

Face à ce constat les autorités ulbistes ont lancé un vaste plan de construction de nouveaux logements. Cependant l’université étant dans une très mauvaise situation financière, ces constructions se feront via des partenariats public-privé. Inutile de rappeler que les compagnies privées de l’immobilier ne sont pas de généreuses philanthropes voulant régler la question du logement étudiant : elles ont pour unique but de faire un maximum de profits. Ainsi les nouveaux logements qui seront construits demanderont des loyers trop élevés pour beaucoup d'étudiant. L'ULB devra donc payer la différence et utilisera donc une partie de son budget social pour enrichir des promoteurs immobiliers. Ce plan de construction de kot n'est en conséquence aucunement une solution de logement pour les étudiants.

Mais les autorités universitaires ne s'arrêtent malheureusement pas là ! Prenant comme prétexte qu'elles n'ont plus assez d'argent pour rénover leurs résidences, elles ont aussi décidé de confier, sans la moindre analyse sérieuse de solutions alternatives, la gestion de la majorité de leurs résidences déjà existantes à une entreprise immobilière. La procédure juridique employée se nomme l’« emphytéose ». Ce changement a pour effet d'augmenter le loyer des étudiants, ainsi que de priver l'ULB d'une source de revenus ré-injectables dans les budgets sociaux universitaire. Ainsi ce plan met non seulement en péril la situation financière des étudiants mais il aggrave celui de notre université. On peut donc sincèrement douter du fait que l'ULB soit un jour capable de reprendre en main la gestion de ses résidences. Ce qui est officiellement un plan d'emphytéoses se transforme, en pratique, en un plan de privatisation pure et simple.

L'argument utilisé par les autorités pour justifier ces politiques est toujours le même : Le sous financement chronique de l'enseignement supérieur (depuis la communautarisation de l’enseignement et l’introduction du système « d’enveloppe fermée » dans les années 1990) l'a mis dans une situation financière qui l'empêche d'avoir une politique sociale en matière de logement. Si le sous financement de notre enseignement est une réalité, on cependant douter du fait que les autorités aient une réelle volonté de changer les choses. Malgré les beaux discours de principes appelant à un refinancement, leurs actions montrent une toute autre réalité. On ne peut que constater que nos autorités refusent de s'opposer concrètement aux partis responsables du sous-financement de l'enseignement (à savoir les partis qui se partagent depuis 20 ans le pouvoir en communauté française). Ainsi notre université continue par exemple à ouvrir ses locaux au PS et au MR pour qu'ils puissent y organiser des congrès ou des meetings.
On notera aussi la présence de notre vice-président Martin Casier grand architecte de la politique de logement ulbiste sur les liste du PS aux dernières élections. Non seulement cela pose question au niveau de l'indépendance politique des autorités ulbistes mais cela ne peut que renforcer nos doutes concernant la politique sociale étudiante défendue par le parti « socialiste ».

Au lieu d'une politique de collaboration et de gestion de la misère, les autorités auraient dut faire preuve d'une réelle solidarité avec les étudiants qui luttent pour un refinancement de notre enseignement à hauteur de minimum 7% du PIB. Par exemple, le 2 avril 2014 à l'occasion de la manifestation de la plate-forme QRPE (Qualité et Refinancement Publique de l'Enseignement), les autorités auraient dut accepter de lever les cours et descendre dans la rue aux cotés des étudiants en lutte.

Il est aussi d'ores et déjà possible et éminemment nécessaire de réformer la politique ulbiste en matière d'attribution de logements. Premièrement, la politique actuelle n’attribue pas les logements de manière prioritaire aux étudiants modestes, même si ceux-ci nécessiteraient prioritairement des logements à bas coûts. Deuxièmement, cette politique maintient des critères méritocratiques absurdes : alors qu'il ne fait aucun doute que les étudiants aux revenus modestes ont plus de difficultés à réussir leurs études supérieures, ils perdent leur place dans les résidences universitaires s’ils ont le malheur de doubler deux fois durant leur cursus.
Enfin, Quand bien même ces étudiants arriveraient à réussir leur bachelier en minimum 4 ans, ils perdraient de toute façon leur place dans les logements de l'ULB puisque les masters n'y sont plus admis. Les autorités utilisent comme argument le fait qu’après 3 ans de vie à Bruxelles, les étudiants seraient capables de se débrouiller tout seul pour trouver un logement. Cependant, à moins que ces étudiants aient gagné au loto durant leur bachelier, on voit mal comment soudainement ils pourraient se payer un kot dans le privé... La politique d'attribution des logements universitaires doit radicalement changer et doit prendre en compte en priorité la situation sociale des étudiants.

Les nombreuses politiques antisociales des autorités universitaires ne peuvent que nous enlever toutes nos fausses illusions. Il est indéniable que les étudiants ne peuvent compter que sur leurs propres forces pour défendre leurs intérêts et leurs droits. Aussi la création d'un rapport de force en faveur des revendications étudiantes est le seul moyen pour amener à un changement radical des politiques de logements étudiants. C'est pourquoi la mobilisation collective doit continuer !

Quelques articles pour allez plus loin :

Le plan de construction de logements ulbiste : http://www.ulb.ac.be/logements/index-politique.html

La privatisation de la résidence Mandella : http://unionsyndicaleetudiante.be/index.php?id=318

Quelque aspect de la politique d'attribution des logements à l'ULB : http://unionsyndicaleetudiante.be/index.php?id=58

Les principes de l'USE, syndicat étudiant de luttes : http://unionsyndicaleetudiante.be/index.php?id=284


  1. Les articles de la catégorie « Billet d’humeur » n’engagent que leurs auteurs et ne sont pas des déclarations publiques, officielles et collectives, de l’Union syndicale étudiante. L’Union syndicale étudiante diffuse sur son site l’avis d’étudiants militants qui souhaitent susciter des débats au sein de la gauche étudiante, à l’intérieur autant qu’à l’extérieur de l’USE. ↩︎