Pourquoi un blocage de l’ULB et une grève étudiante ?

Retour sur la pertinence du mode d'action de la grève étudiante, de la grève de solidarité, et du blocage d'un lieu de travail.

Pourquoi un blocage de l’ULB et une grève étudiante ?

Ce mercredi 9 novembre s’est déroulée en Belgique une grève générale contre la hausse des prix. Dans à peu près tous les secteurs, travailleuses et travailleurs étaient à l’arrêt et de nombreux piquets de grève se sont organisés sur leurs lieux de travail.

C'est quoi une grève générale ?

La grève générale est une action solidaire et collective qui rassemble toustes les travailleur.euses d’un pays par l’arrêt de leur travail. C’est un moyen pour toustes les travailleureuses d’arracher des droits au gouvernement, des augmentations de salaire, et de meilleures conditions de travail au patronat. En effet, ce sont elleux qui font tourner le pays et l'économie : lorsqu’iels s’arrêtent, tout s’arrête. Les travailleur.euses prennent alors conscience de leur pouvoir et du pouvoir relatif qu’a l’Etat bourgeois.

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La grève est à l’origine de la quasi-totalité des droits sociaux que nous avons aujourd’hui : les congés payés, le salaire minimum, la semaine de 38 heures, les congés maladie, la sécurité sociale, l’allocation de chômage, la retraite, etc. Ceux-ci ont été arrachés dans la rue avant d’être votés au parlement. La grève est un droit fondamental reconnu par la cour Constitutionnelle qui est constamment remis en question par le patronat et les forces réactionnaires.

Une grève étudiante, pourquoi faire?


Déjà car en tant qu’étudiant.es nous nous considérons aussi comme travailleur.euses, étant donné que l’on produit une forme de savoir via nos études qui peut être réutilisé par nos professeur.es, maîtres de stages, etc. C’est pourquoi nous avons rejoint la grève générale du 9 novembre à l’ULB : c’est, d’une certaine manière, notre lieu de travail. Il est aussi important de rappeler qu'un près d'un étudiant sur deux se voit dans l’obligation d’avoir un job en parallèle à ses études, et est donc, très souvent, un travailleur flexible.

Nous avons également fait grève en solidarité avec les travailleur.euses. Mais aussi parce que nous non plus, nous ne pouvons plus payer nos loyers, nos factures, nos courses. La précarité étudiante augmente : bon nombre d’étudiant.es ne peuvent pas compter sur l’aide financière de leurs parents et de plus en plus doivent faire appel à des services d’aides sociales et/ou travailler à côté de leurs études pour se financer. S’il était déjà difficile, voir impossible, pour certain.es de combiner études et travail rémunéré, l’augmentation des prix ne fait qu’empirer leurs situations. De plus en plus d’étudiant.es doivent choisir entre aller en cours ou aller travailler pour se financer et ce n’est pas normal.

Des mesures concrètes doivent être établies dès maintenant contre la précarité étudiante. Face à l’urgence pour bon nombre d’étudiant.es, nous avons décidé de bloquer ce mercredi 9 novembre pour la grève générale.

Et le blocage ?

Nous avons bloqué pour forcer l'État à nous écouter dans cette crise: Nous n’avions pas le choix. Parce que nous en avons marre de ne pas nous faire entendre, nous en avons marre qu’il n’y ait aucune mesure réelle pour lutter structurellement contre ces problèmes, nous en avons marre que les patrons et leurs actionnaires s’enrichissent sur notre dos.

On peut se rendre compte de la pertinence d'un blocage en deux points :

  • Premièrement, si le blocage de certains services de l’université comme la cantine, les cours, etc. ont été si handicapants pour de nombreux.ses étudiant.es, c’est premièrement parce que les travailleur.euses qui les font tourner ont un travail d’une importance capitale tant au sein de l’université que dans la société dans sa globalité. Il est anormal que les personnes qui nous permettent de nous déplacer, d’étudier dans des lieux propres, de nous nourrir, etc. aient des conditions de travail et un salaire qui se dégradent jusqu’à compromettre la décence de leurs conditions de vie matérielles et la qualité voire l'existence-même des services fournis. Un jour de blocage permet donc de mettre en lumière le caractère indispensable de ces métiers et la nécessité de les revaloriser en augmentant les salaires, mettant fin à la sous-traitance et refinançant l’enseignement supérieur. L’adoption de ces revendications que nous partageons avec le front commun syndical au sein de l’ULB est l’objectif premier de cette grève.
  • Deuxièmement, le blocage de certains services de l'université comme les restaurants offrant des repas à 2 euros ou la bibliothèque, que nous aurions également pu bloquer, fut aussi très handicapant pour de nombreux étudiant.es. Ceci confirme non seulement la précarité banalisée de beaucoup d’étudiant.es qui sont forcé.es de se rendre en bibliothèque (chauffée, contrairement à nos logements) ou d’acheter exclusivement des repas très peu chers car leur logement et leurs moyens ne leur permettent aucune alternative ; mais également d’enjoindre le gouvernement à prendre des mesures concrètes et structurelles pour lutter contre cette précarité étudiante dont nous sommes beaucoup à être victime. Nous pourrions le faire notamment grâce à un salaire étudiant, à la rémunération des stages et à un blocage des prix de l’énergie : des mesures qui sont au centre de nos revendications.

Nous estimons qu’un ou plusieurs jours d’arrêt de ces services sont totalement justifiés lorsque ceux-ci servent à mettre en avant leur importance fondamentale et la raison pour laquelle ils sont indispensables pour les étudiant.es. L’arrêt contraint le gouvernement à nous écouter et à instaurer des mesures structurelles afin de sortir les étudiant.es de la précarité, d'assurer la continuité de ces services et d'améliorer les conditions de vies des travailleur.euses qui leur donnent vie et c’est précisément ce que l’Union Syndicale Étudiante a fait ce 9 novembre 2022.

Nous savons que le blocage a suscité de la colère et de l'incompréhension chez certain.es étudiant.es voulant travailler mais nous espérons qu’iels comprendront l’urgence : Nous n’avions d’autre choix face au silence des employeur.euses et politicien.nes.

Nous devons nous faire entendre car nous ne pouvons plus suivre l’augmentation des prix. Nous avons bloqué les bâtiments de l’ULB pour empêcher la production. Nous n'avons pas bloqué et fait grève pour pénaliser les étudiant.es. Cet argumentaire est une ineptie sortie de la droite qui fait abstraction de toutes les avancées sociales obtenues par ce moyen d’action. Parler de « liberté de travailler » c’est remettre en cause la légitimité de la grève.

Nous avons bloqué pour inviter tous les étudiant.es à nous rejoindre car c’est par la force collective et les rapports de force que nous gagnerons nos combats.

Un grand merci à toustes celleux qui nous ont rejoints au piquet de grève, aux professeur.es qui ont annulé leurs cours, et à celleux qui n’avaient d’autre choix que d’aller en cours ou au travail mais qui étaient solidaires !

Piquet de grève de la CGSP - Enseignement Recherche sur l'ULB

Beaucoup de soutien également à toustes les travailleur.euses qui étaient en grève partout en Belgique et ailleurs.

Mais nous ne nous arrêtons pas là. Nous savons qu’une grève d’un jour n’est pas assez. Nous continuons notre travail d’entraide sociale, de distribution de repas à prix libres et prévoyons d’autres actions et mobilisations pour la suite.

En espérant que vous nous rejoindrez en masse!

À très bientôt,

L’Union Syndicale Étudiante