Psychologie : une situation préoccupante pour les étudiant·e·s
En novembre 2017, la locale ULB de l’Union syndicale étudiante a été contactée par des étudiant·e·s de Master 1 en psychologie, finalité clinique, concernant la situation alarmante de nombre d’entre elleux face au stage et au mémoire.
La situation, en faculté de psychologie, est difficile: les étudiant·e·s sont sous-encadré·e·s, les professeur·e·s et assistant·e·s débordé·e·s et les auditoires bien trop remplis pour apprendre dans des conditions sereines. En bref, les moyens sont trop faibles pour offrir un cadre d’apprentissage correct à tou·te·s les étudiant·e·s.
Dans ce contexte général, les problèmes rencontrés par les master 1 clinique sont particulièrement sévères : alors que les étudiant·e·s doivent rendre le nom de leur promoteur/trice pour le 8 décembre, il n’y a plus de professeur·e·s disponibles et une grande partie de l’auditoire se retrouve sans encadrant·e. Deuxièmement, beaucoup d’étudiant·e·s se retrouvent sans stage, faute de places disponibles, alors qu’illes doivent le prester à partir de février. Ces conditions mettent les étudiant·e·s en concurrence et menacent certain·e·s de ne pas pouvoir valider leur année.
Avec notre aide, une assemblée étudiante se réunit fin novembre. Plus de 60 étudiant·e·s y sont présent·e·s, dont la moitié n’a pas de promoteur/trice et un tiers n’a pas de stage. Une série de revendications y sont votées dont, entre autres, l’attribution pour tou·te·s d’un·e promoteur/trice avant les vacances d’hiver, la non-mise en échec des étudiant·e·s qui n’auraient pas de stage, l’assouplissement des conditions de stages, une meilleure communication au sein de la faculté, des embauches dans le corps académique et de personnel administratif et contre un examen d’entrée en psychologie. La décision est prise d’adresser une lettre ouverte au doyen de la faculté, au recteur de l’ULB et au ministre de l’enseignement supérieur (disponible ici). La lettre est rapidement signée par plus de 300 étudiant·e·s, chercheurs/euses et académiques.
Une rencontre est organisée avec le doyen, l’USE et les étudiant·e·s mandaté·e·s par l’AG. On y apprend que les inscriptions en master ont augmenté de 30% cette année. Deux jours plus tard, la faculté annonce qu’elle embauche un cadre supplémentaire pour gérer les mémoires. Une première victoire !
Quelles analyses tirer de la situation des étudiant-e-s en psychologie et de cette lutte?
1. La lutte paye
L’embauche d’un cadre supplémentaire constitue une première victoire, dont il ne faut pas négliger l’importance. Une fois de plus, l’expérience montre que quand les étudiant·e·s s’organisent (et ici, sans nécessairement passer par la représentation officielle), illes obtiennent des avancées.
2. La lutte est internationale : solidarité avec les camarades français·e·s !
La situation en psychologie montre la nécessité de mener une lutte internationale contre la sélection. En effet, les étudiant·e·s français·e·s font actuellement face à des politiques austéritaires et de sélection de plus en plus fortes dans l’enseignement supérieur : en septembre 2017, la sélection en master a été instaurée, expliquant probablement l’augmentation importante du nombre d’étudiant·e·s français·e·s en psychologie à l’ULB (d’autant plus qu’en psychologie, les facultés françaises peuvent sélectionner en première ET en deuxième année de master). La situation devrait encore s’aggraver puisque certaines facultés institueront “seulement” en 2018 la sélection en première année.
Cette situation n’est pas inédite en Belgique francophone puisque de nombreuses filières en lien avec la santé (comme médecine, dentisterie, sciences vétérinaires, logopédie, kinésithérapie et audiologie) connaissent déjà un nombre important d’inscriptions françaises, en lien avec le difficile accès à ces études en France. Les autorités belges y ont répondu par l’instauration du système de contingentement : le nombre d’étudiant·e·s étrangers/ères ne peut pas dépasser 30% des inscriptions pour ces filières. Lorsque le quota est atteint, les étudiant·e·s étrangers/ères sont tiré·e·s au sort. Face au nombre croissant d’inscriptions en psychologie, les autorités ne cachent pas leur inclinaison pour cette solution.
Ainsi, la sélection française ne fait que déplacer le problème : dans un premier temps, les étudiant·e·s français·e·s recalé·e·s qui en ont les moyens s’inscrivent en Belgique francophone. Ici, en plus d’une situation sociale parfois difficile (illes n’ont pas accès aux aides sociales), illes intègrent des filières sous-encadrées. Dans un second temps, les autorités côté belge utilisent ces mauvaises conditions d’études comme argument pour justifier une sélection à l’entrée des étudiant·e·s étrangers/ères.
De leur côté, nos camarades français·e·s de Solidaires Etudiant·e·s luttent contre cette sélection en master, dont les effets néfastes se répercutent jusque dans notre enseignement. La sélection ne s’arrête pas aux frontières, mais notre solidarité et nos luttes non plus !
Pour aller plus loin : les communiqués de Solidaires Etudiant-e-s
► Contre la sélection : du budget pour nos formations! ◄
► Sélection en master : l’accord de la honte ◄
► Sélection en Master : de moins en moins floue, de plus en plus nuisible ◄
3. Un nécessaire refinancement de l’enseignement
Il est indispensable de refinancer l’enseignement supérieur à la hauteur de ses besoins. En effet, la situation en psychologie n’est qu’une illustration de la situation actuelle de l’enseignement supérieur : depuis les années 90’ et l’instauration du principe de l’enveloppe fermée, le nombre d’étudiant·e·s augmente et le financement par étudiant·e diminue (il a diminué de 22% entre 1991 et 2013, en tenant compte de l’inflation). L’université s’élitise et l’accès et la réussite devient de plus en plus compliqué pour les jeunes issu·e·s des classes populaires et moyennes : la diminution de l’encadrement pèse en effet encore plus sur ces populations. Dans ce contexte, toute solution sans refinancement durable n’est qu’une rustine temporaire.
La lutte pour des meilleures conditions d’étude en psychologie n’est évidemment pas terminée et nous sommes déterminé·e·s à aller plus loin. Les solutions trouvées sont déjà des victoires mais il ne s’agit que de réponses temporaires à un problème plus profond qui nécessite des solutions durables : un refinancement de l’enseignement supérieur à hauteur de ses besoins partout et pour tou·te·s !