Éloge critique sur l’univers politique de « Bologna la rossa » #4

Éloge critique sur l’univers politique de « Bologna la rossa » #4

« J’ai vécu à Bologne entre octobre 2015 à septembre 2016, et j’ai pu observer et fréquenter tout un univers d’engagement politique et militant, comme je n’en avais jamais vu ailleurs. »

Par Orville, étudiant à l’ULB et à l’Università di Bologna en 2015-2016.

Cet article est le quatrième d'une série de 5 textes :

CUA vs Link - deux organisations similaires mais aux visions distinctes

L’idée ici n’est pas d’opposer ces deux organisations que j’ai le plus côtoyées, allant parfois à certaines de leurs réunions, ou suivant de plus près leurs actions. Étant moi-même un militant syndicaliste universitaire, partant du principe qu’on est plus utile en agissant sur son propre terrain d’étude ou de travail, en soutenant des luttes précises pour obtenir des améliorations concrètes et immédiates, je me suis donc tout de suite reconnu dans les organisations qui menaient des luttes étudiantes. C’est le cas du CUA et du syndicat étudiant Link, mais qui représentent selon moi deux formes d’émergence diverse des mouvements politiques actuels en Italie. Tous deux acceptent l’idée que l’ère des partis politiques comme forces révolutionnaires est révolue.
Dans cette dernière partie, je vais rentrer beaucoup plus en détails concernant mes observations sur base de mon vécu et de mon expérience de l’an dernier. En fonction des luttes que j’ai pu suivre, ou lors d’évènements précis, je vais essayer de démontrer ce qui caractérise le plus ces deux organisations, marquant leurs différences, bien qu’il soit parfois incompréhensible qu’elles ne sachent pas militer ensemble… Il en est ainsi et pas autrement, bien que je me sois retrouvé plus d’une fois dans une posture de médiateur pour essayer d’en modifier la donne.

Le CUA : le collectif autonome d’action directe

Le Collettivo Universitario Autonomo, comme expliqué dans le numéro précédent, fait partie d’un mouvement autonome très fort à Bologne autour du Crash. Il s’organise dans un réseau encore plus large en Italie du nom d’InfoAut’, regroupant des collectifs autonomes dans plusieurs villes comme Turin, Rome, Milan, ou encore Cagliari. Pour rappel, l’autonomie se situe depuis les années 1970 dans une rupture historique avec les mouvements politiques classiques de la gauche radicale et dite « révolutionnaire ».
Le CUA se revendique entièrement de cette culture politique de l’autonomie des années 1970, comme de leur martyr Francesco Lorusso, et de la défense de la zona universitaria comme espace de radicalité conflictuelle et de lutte des classes. Ils se revendiquent également de l’opéraïsme. Leur mérite et la certaine légitimité de tenir un tel discours, se retrouve dans un maintien des pratiques de lutte comme l’autoréduction, et l’action directe en général.

Ainsi, presque une fois par mois, le CUA organise une action simple mais pourtant impressionnante : le blocage de la cantine universitaire – la mensa – dont le prix pour un repas complet coûte 6€. L’entrée est alors bloquée avant son ouverture, et accessible qu’à la condition de réduire de moitié les prix des repas (3€ au lieu de 6€). La direction de la cantine est donc obligée d’accepter, au risque de ne voir aucun « client », et réduire son chiffre d’affaire. Une autoréduction qui est donc effective, avec des étudiant-e-s qui font juste une file plus longue que prévue, sachant que le repas sera à moitié prix. Bien entendu, il y a toujours ceux/celles qui refusent tout acquis collectif, et tiennent absolument à payer le prix plein… Cette pratique d’autoréduction peut également se faire ailleurs, comme à des expositions d’art où le ticket coûte 8€ au prix étudiant. Le CUA se ramène en groupe de 30-40 personnes, et explique que si l’on ne leur fait pas payer l’entrée à 3€ pour tou·te·s, le groupe fera demi-tour et cet argent potentiel ne rentrera pas dans les caisses. On peut ainsi régulièrement jouer sur l’avidité de ces services, et les mettre face à leurs contradictions.

Le CUA est dans une recherche permanente du conflit. Il estime que c’est de cette manière que les tensions et les oppositions de classe vont ressurgir, capables de générer de nouveaux mouvements contestataires. Le CUA souhaite ainsi être un catalyseur de l’intensité des luttes, en cherchant à atteindre une certaine polarisation dans les confrontations avec les autorités universitaires, ou envers les étudiant·e·s qui ne se montrent pas solidaires des causes à défendre. J’ai pu observer à plusieurs reprises combien il souhaitait que tel ou tel mouvement aille toujours dans cette même orientation stratégique, espérant à chaque fois apercevoir un sursaut de conscience parmi les étudiant·e·s. Reposant sur près de 30 à 40 militant·e·s actif·ve·s, le CUA n’a donc aucun problème à s’engager seul dans une lutte et faire adhérer davantage de personnes par la suite, toujours dans cette idée de polarisation des prises de position de chacun·e, à l’inverse d’une recherche du consensus absolu.

Ce fut le cas lors d’une lutte contre la baisse des critères d’accès aux bourses avec un nouveau calcul ISEE (Indicateur de Situation Économique Équivalente), pour que les régimes sociaux puissent savoir combien d’aides accorder aux familles. Sans passer par une AG au préalable, le CUA se mit à bloquer l’accès aux bâtiments, enrageant les habituel·le·s étudiant·e·s voulant se rendre en cours. Après une matinée chahutée, les étudiant·e·s sont invité·e·s à se rendre en assemblea (AG) pour discuter sur les raisons et les objectifs du blocage, et la suite du mouvement. On peut contester la légitimité de la méthode, mais le résultat est acquis et les étudiant·e·s vont à ces AG « post-action ». Toutes les AG auxquelles j’ai assistées ont d'ailleurs été pour moi très particulières car suivant un fonctionnement très différent de ce dont j'avais l'habitude en Belgique, sans tour de parole et avec très peu de votes, où on discute (parfois pendant des heures) et on voit ce qui se décide.

Le CUA mène généralement des campagnes et des luttes pour le diritto allo studio (droit d’accès aux études), tel un syndicat étudiant, mais uniquement dans une pure lutte politique, sans travail d’entraide solidaire si ce n’est leurs actions d’autoréduction qui ont une portée très sociale. Au-delà de ça, le CUA s’inscrit dans une dimension culturelle et esthétique très forte de son action militante, avec de nombreuses soirées organisées en autogestion dans la faculté dite occupée du 38 via Zamboni, qui est l’allée principale de la zone universitaire. Ces soirées festives sont leurs principales sources d’autofinancement. Le CUA organise aussi chaque année, vers la fin du printemps, le BITT – Batti il Tuo Tempo (Bats ton moment présent) – où Piazza Verdi, centre névralgique de la zone universitaire, est occupée pendant plusieurs jours pour y exposer des manifestations artistiques, concerts, nouveaux murales (fresques) etc. Tout a un sens dans cet espace politique que représente la zona universitaria, à partir de laquelle toute manifestation du CUA doit absolument débuter.

Les militant-e-s du CUA mettent également en avant leur héritage politique auto-proclamé, où seul le CUA peut se revendiquer de Lotta continua ou de Potere operaio, les autres organisations n’en faisant profit que par imposture idéologique. C’est donc à eux que revient l’organisation du cortège annuel du 11 mars, avec l’ensemble de leur réseau autour du Crash, en hommage à Francesco Lorusso et le mouvement insurrectionnel de Bologne en 1977. Ce fut néanmoins l’une des plus belles manifestations auxquelles j’ai participé, parmi un cortège nocturne avec des individus en majorité de noir vêtu et des drapeaux rouges flottant au vent, aux slogans évocateurs de cette belle époque dont on tient à faire perpétuer l’esprit de résistance et de rébellion :

« 11 marzo, bandiere rosse al vento.
Uccidon’un compagno, nascon’altri cento »
« Francesco è vivo, e lotta insieme a noi.
Le nostre idee, non moreranno mai »

[En français : “11 mars, drapeaux rouges au vent.
Ils tuent un camarade, il en renait 100”
“Francesco est vivant, et lutte avec nous.
Nos idées, ne mourront jamais”]

Début de la marche du 11 marzo, depuis Piazza Verdi. Sur la banderole : « Pour Francesco et les luttes d’aujourd’hui, drapeaux rouges au vent. »

Le cortège fait le tour du centro storico de Bologne, rappelant à toute la ville que le mouvement autonome est toujours là.

Le CUA cultive à mes yeux très largement ce que les post-opéraïstes appellent par eux-mêmes l’« autoréférentialisme », c’est à dire cette manie de développer des modes d’expression et des codes militants qui ne parlent qu’aux militant·e·s eux/elles-mêmes. Toute la culture militante qui se forme autour de l’autonomie en Italie a certes tout son sens, que ce soit dans le maintien des luttes ou la commémoration des mouvements et événement historiques. Le problème reste néanmoins de se conforter au final dans sa propre réalité militante actuelle, sans remettre en question ses pratiques, ses méthodes ou ses moyens d’action pour populariser au mieux les luttes et les causes à défendre.
À force de ne pas prendre de recul sur quel pouvait être le ressenti de la grande majorité des étudiant·e·s de l’Université de Bologne, en dehors de leur clan de 40 personnes, j’ai fini par remarquer que le CUA s’est un peu isolé et laissé marginaliser, alors qu’il est une force militant hégémonique sur le terrain de la zone universitaire. En effet, il n’y a que peu de place laissée aux autres collectifs (dont les affiches sont parfois arrachées, car c’est leur zone). Les postures du CUA vont jusqu’à insupporter plusieurs étudiant·e·s de gauche avec qui j’ai pu discuter, lassé·e·s de leurs stratégies que tout le monde connaît, comme si au lieu d’atteindre la polarisation des humeurs, il ne faisait que désintéresser de l’action politique les étudiant-e-s plus sensibles et attentif·ve·s. Comme un certain effet d'usure qui passe avec le temps.

Les membres du CUA ne sont également pas très ouvert·e·s, estimant qu’à 30-40 militants, on peut mener n’importe quelle action. J’ai pu aussi remarquer des éléments très problématiques dans leur fonctionnement interne, où comme en AG il n’y a pas de modération pendant leurs réunions, mais cela nécessite néanmoins un minimum de partage de la parole entre chacun·e. Or, ce sont souvent des hommes qui prennent la parole, à carrure de leaders charismatiques et souvent de « chefs », propageant la juste orientation que doit prendre l’action collective du CUA. Les camarades femmes, alors que tout autant actives comme militantes, sont rares à prendre la parole en réunion.
Un aspect que je trouve par contre plus positif dans les AG italiennes toutes confondues, est celui de la « culture du silence ». Puisque qu’il n’y a pas de modération avec des personnes déjà inscrites pour prendre la parole, on assiste souvent à des blancs où personne ne parle, où on réfléchit par rapport à ce qui a été dit juste avant, et la première personne souhaitant intervenir à nouveau n’a qu’à se lancer.

Je voudrais néanmoins terminer ce commentaire sur le CUA par un éloge envers leur courage et leur détermination, par rapport à une sorte de culture d’affrontement avec la police. À bout de banderoles en tissu, sans casques et en évitant de se masquer le visage, on tient la ligne et c’est même le cortège qui se rapproche toujours plus des carabinieri en tenue anti-émeute, donc bien équipés. Au premier contact, coup de matraque contre coup de bâtons (souvent des mâts de drapeaux ou des pancartes, utiles dans ces situations^^), on essaye de résister le plus possible à la charge violente des policiers, on recule, on prend soin des blessé·e·s, on souffle, et puis on y retourne. Cela peut durer pendant une demi-heure sans interruption. Remarquable, même si cela prend parfois la tournure d’un jeu et d’un objectif direct de chercher la confrontation avec la police comme une finalité, ne serait-ce que pour symboliser cette image de la résistance autonome face à la répression, et pour en consolider le discours par la suite.

À titre personnel, je me rappellerai toujours du 8 novembre 2015, où je me suis retrouvé sur le Ponte Stalingrado aux côtés du CUA, entre le quartier populaire de San Donato, pour nous diriger vers la zone universitaire. Matteo Salvini, chef de la Lega Nord, Fratelli d’Italia, Berlusconi, Casapound et Forza Nuova : toutes les forces d’extrême-droite s’étaient données rendez-vous à Bologne, dans une provocation ouverte contre la ville et son esprit de résistance antifasciste. Dans le cadre des élections municipales, en campagne nationale contre les centres sociaux, la venue de Salvini rejetée en grande majorité par les habitant·e·s de Bologne, aura au moins permis de fédérer l’ensemble des mouvements militants, malgré les différents cortèges et appels à manifester du jour. Les mots d’ordre et collectifs lancés pour l’occasion : « Difendere Bologna » (Défendre Bologne) ou « Mai con Salvini » (Jamais avec Salvini).
Sur le Ponte Stalingrado, l’objectif était de partir symboliquement d’un quartier populaire, contre les discours racistes de l’extrême-droite, et traverser la zone universitaire pour nous rendre jusqu’à Piazza Maggiore, au centre du centro storico où Salvini et ses sbires allait se rassembler. Au printemps suivant, Salvini avait récidivé la provocation en appelant à un rassemblement directement sur Piazza Verdi. À une semaine de sa venue, uniquement « déconseillée » par les autorités de la ville, la place fut alors barricadée entièrement par le CUA, avec des bottes de foin aux différents accès de la place ! Le 8 novembre, cela représentait par contre pour les fascistes une mobilisation nationale, et la résistance ne pouvait compter que sur les forces militantes de Bologne, avec quelques soutiens venus de Milan, Turin ou de Rome.

Rassemblement au Ponte Stalingrado, à l’appel du mouvement « Diffendere Bologna ».

Comme on pouvait s’y attendre, le Ponte Stalingrado fut bloqué par la police, et il y eut des affrontements très intenses entre manifestant·e·s et carabinieri, malgré l’arrivée d’un autre cortège derrière la ligne des flics. L’événement des fascistes était surprotégé par la police, et ils ont pu finalement organiser leur meeting. Malgré tout, on peut parler d’une victoire en demi-teinte pour l’antifascisme, sachant que les fafs ont été escortés tout du long de leur arrivée dans la ville, au vu de la mobilisation générale à Bologne.

8 novembre sur le Ponte Stalingrado


Affrontements avec les carabinieri

Une vidéo qui résume le tout (à 0:55 la scène illustre exactement ce que j'expliquais sur la détermination des autonomes; petit coucou à 1:44^^).

Cette culture d’affrontement avec la police peut aussi se développer sur des victoires, comme lors de la très fameuse « libération » de Piazza Verdi, où la police fut littéralement dégagée par la force de la masse des étudiant-e-s, le 27 mai 2013. Depuis le 8 novembre, le CUA développe tout un romantisme militant similaire autour de cette journée de mai, le faisant dorénavant sur la « résistance » qui eut lieu ce jour-là au Ponte Stalingrado. Ces journées de lutte s’inscrivent donc continuellement dans une narration à caractère romantique, pour se conforter dans les buts et l'action permanente de défendre la zona universitaria, et de son symbole politique.

Pour le plaisir, voici la vidéo de la victoire des étudiant·e·s sur la police en mai 2013 (surtout à 5:43).

Link : le syndicat étudiant combatif et indépendant

Link-Coordinamento Universitario est une coordination de syndicats étudiants, mais je me suis moins reconnu dans leurs pratiques de lutte. Cependant, j’ai été largement surpris à plusieurs reprises au fil des mois où j’ai appris à les connaître. Link fut fondée à travers les mobilisations du mouvement de l’Onda, où il était nécessaire pour une partie des collectifs – créés durant le mouvement en 2008 – de se regrouper en une même coordination nationale. C’est le rôle qu’a pu jouer Link, officialisant sa création en 2010, lors d’une grande assemblée nationale à Rome.
Link a tout de suite tenu à se rapprocher de l’Unione degli Studenti (UdS, Union des étudiants), le syndicat lycéen fondé en 1994, et bien plus à gauche que le syndicat étudiant officiel – partenaire italien de la FEF – l’Unione degli Universitari (UdU, Union des universitaires), fondé aussi en 1994. L’UdU a d’ailleurs parfois des positions très louches sur la question des migrant·e·s et des réfugié·e·s. Link de son côté a su développer un projet commun avec l’UdS, pour créer un large réseau interprofessionnel, rassemblant lycéen-ne-s, étudiant-e-s, doctorant-e-s et académiques. L’objectif fut rapidement atteint, avec la fondation en 2011 de la Rete della Conoscenza, rassemblant Link et l’UdS sous un même réseau officiel pour organiser l’ensemble des individus en formation, un « réseau de la connaissance ».

J’ai surtout côtoyé la section de Bologne : Link-Studenti indipendenti (Link-Étudiants indépendants). J’ai également pu me rendre au congrès de l’ensemble de la coordination Link, pendant l’été, à l’occasion du Riot Village (plus grand camp politique étudiant d’Italie, au bord de la mer du Sud^^). J’y ai découvert une large force militante, dans l’unique but de relancer des mouvements étudiants combatifs à une échelle nationale. En effet, Link organise des syndicats dans pratiquement toutes les universités d’Italie, et pas que dans les grandes villes, gardant toujours un esprit d’autonomie locale. Dans les luttes qui concernent l’ensemble du secteur de l’enseignement public, ils cherchent à se coordonner en permanence avec l’UdS, le syndicat lycéen.

Link pratique donc un syndicalisme combatif et indépendant vis-à-vis des partis politiques, actant eux aussi la crise et la fin des ces organisations, devenues pour beaucoup en Italie totalement obsolètes. Et c’est là qu’il est très intéressant d’observer que cette jeunesse étudiante et universitaire qui rejoint Link, est dors-et-déjà très politisée, pour la plupart depuis des années, sans jamais avoir été dans une organisation politique auparavant puisqu’on y trouve plus forcément de sens à y militer. Ils/elles ont tou·te·s cette culture politique historique de la gauche italienne, à dimension communiste, mais qui se retrouve également dans toutes les autres aspirations idéologiques de la gauche contestataire et révolutionnaire.
Ainsi, cette idée m’est surtout venu en participant à leur camp annuel, rassemblant des centaines de militant·e·s syndicalistes venu·e·s de toute l’Italie. On parle presque de toute une génération de jeunes italien·ne·s, n’ayant plus de parti politique vers qui se tourner, et souhaitant pourtant agir contre le démantèlement de l’enseignement public, ainsi que de bien d’autres luttes antifascistes, antiracistes, féministes et écologiques. Link s’inscrit donc dans une belle optique combattive, comme alternative aux organisations politiques et face à la crise des partis politiques en Italie, du moins dans les luttes étudiantes.

La manière dont Link s’organise et pratique leur activité syndicale est très intéressante. Le syndicat de Link-Bologna, en plus d’être une section parmi l’ensemble du réseau national, regroupe dans sa propre structure locale différents collectifs étudiants (un par faculté). Ceux-ci peuvent donc s’investir sur des problématiques liées à leurs facultés respectives de sciences politiques, médecine, ou encore celle de philosophie et lettres.
Ces collectifs locaux peuvent alors s’organiser comme ils le souhaitent, tout en respectant les positions politiques de Link. Pour mener des campagnes plus générales, c’est la structure locale de Link-Bologna qui réunit les militant·e·s de toutes les facultés. Dans ma faculté de philosophie et lettres, comme étudiant en histoire, je pouvais par exemple rejoindre le collectif de Lettere aperte (Lettres ouvertes). Parmi leurs activités, ce qui m’a le plus frappé fut la mise en pratique des principes de partage du savoir et d’accès à l’enseignement pour tou·te·s. Cela consistait en des séances de présentation des travaux de fin d’études (bachelier ou master), par et pour les membres du collectif, mais aussi pour toute personne inscrite ou non à l’université. Une belle manière de se rappeler qu’avant tout d’être militant·e·s, les syndicalistes que nous sommes sont aussi des étudiant·e·s qui aspirent à devenir des créateur·rice·s de savoir.

Logo du collectif de Link-Bologna

On pourrait penser que j’ai une préférence entre ces deux organisations, à voir mon commentaire sur Link vis-à-vis de celui du CUA. Le syndicalisme étudiant m’est beaucoup plus familier en effet, et j’ai fini par être toujours plus sceptique quand à certaines pratiques du mouvement autonome (alors que d’autres sont admirables), voyant que cela ne permettait pas à plus d’étudiant·e·s de rejoindre leurs luttes.
Je ne pense pas non plus que Link réussisse à fédérer davantage d’étudiant·e·s autour de leur projet politique, par d‘autres moyens plus consensuels ou avec une meilleure cohésion sociale d’idées et de principes entre leurs membres. L’année dernière, ils/elles étaient surtout impliqué-e-s pour la première fois dans les élections étudiantes qui se font tous les 6 ans. Link-Bologna y aura donc investi beaucoup de candidat·e·s et d’énergie, obtenant néanmoins plusieurs élu·e·s, et se distinguant des autres listes par leur caractère plus militant, par rapport à d’autres organisations étudiantes (liées au PD ou à la secte CL) qu’on ne voit qu’aux élections.

Au final, il est impressionnant que parmi les organisations étudiantes actives, la réalité militante se résume à l’action du CUA et de Link, avec quelques militants trotskistes par ci par là. Cela sans compter l’ensemble des collectifs et centres sociaux, très actifs et présents sur des luttes qui dépassent la zone universitaire. Il est seulement dommage de voir autant de divisions parmi les forces en présence. Quoi qu’il en soit, l’esprit de résistance à Bologne est néanmoins maintenu, c’est le plus important.